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Hamlaoui MEKACHERA : Ministre délégué aux Anciens Combattants, auprès de la ministre de la Défense

Hamlaoui Mekachera est né le 17 septembre 1930 à Souk-Ahras en Algérie.

Cursus

- Diplômé en droit et en criminologie à la Faculté de droit de Nantes

- Lauréat du Centre supérieur des affaires et de l’Ecole nationale de la Santé publique

Distinctions

Officier de la Légion d’honneur et de l’ordre national du Mérite, Hamlaoui Mekachera a également obtenu la Croix de la Valeur militaire et la Médaille coloniale.

Parcours professionnel

- Officier d’infanterie en Algérie en 1958, Hamlaoui Mekachera poursuit sa carrière en France à partir de 1962. Jusqu’en 1965, il est tour à tour lieutenant, capitaine puis commandant au 60e régiment d’infanterie (RI) de Lons-Le Saunier.

- En 1965, il rejoint le 137 RI de la Roche-sur-Yon puis le Centre d’instruction du service de santé des armées à Nantes. Promu commandant de compagnie en 1976, Hamlaoui Mekachera devient Directeur de l’instruction. Il quitte Nantes en 1977, date à laquelle il prend la tête du Centre psychotérapique du Jura, dont il est directeur jusqu’en 1986. Il dirige ensuite, et jusqu’en 1995, le Centre hospitalier spécialisé du Jura.

- De 1988 à 1995, Hamlaoui Mekachera est membre du Conseil supérieur des hôpitaux et de la Commission nationale de nomination des médecins chefs de service.

- Appelé comme Délégué ministériel à l’Intégration dans le Gouvernement d’Alain Juppé en 1995, Hamlaoui Mekachera devient membre du Conseil économique et social en 1998.

- Il est Président du Conseil national des Français musulmans.

Fonctions ministérielles

2002-2005 : Secrétaire d’Etat aux Anciens Combattants, auprès de la ministre de la Défense

Sources : Who’s who



Hamlaoui Mekachera, ministre des oubliés de l'histoire (Le Monde | 05.07.02) 

Contrairement à un début de légende, Hamlaoui Mekachera n'a en effet rien d'un harki. S'il a combattu contre les rebelles du FLN, ce n'est pas en qualité de supplétif - ces musulmans sans formation militaire auxquels on donnait un fusil et une maigre solde pour se battre -, mais comme officier de l'armée française. Pour ce natif de Souk Ahras, à l'extrême est du pays, l'Algérie c'était la France. Sans états d'âme.

Et, militaire, l'ancien commandant Mekachera l'est jusqu'à la couture du pantalon. Il a de qui tenir. Si son grand-père paternel s'était engagé sur un coup de tête et rejoignit assez vite la ferme familiale, son père fit carrière comme officier dans l'armée française et, après avoir vécu l'horreur des tranchées de 1914-1918, fut assez gravement touché au cours de la guerre du Maroc pour mourir des suites de ses blessures en 1930, alors que Hamlaoui avait à peine un an. En outre, bien qu'il ne l'y ait pas encouragé, l'un de ses cinq enfants a choisi la carrière des armes - il est actuellement capitaine au Kosovo -, ainsi que deux frères de son épouse. C'est dire que, même s'il a quitté l'active depuis 1977, le nouveau secrétaire d'Etat a conservé le maintien, la manière de penser et de s'exprimer de son ancien état, et se trouve à son aise rue de Bellechasse, ce ministère qui, avec sa cour carrée au milieu de laquelle flottent les trois couleurs, ressemble furieusement à une caserne. Lorsqu'il étrenne les fastes de la salle à manger ministérielle, avec une visible gourmandise, et déjà un léger rituel - le whisky sur glace qui l'attend semble avoir été apporté par une ordonnance zélée -, on se croirait presque dans le mess des officiers d'une très parisienne garnison.

" Etre assis à la table de la République"... Est aujourd'hui exaucé ce vœu qu'il avait formé lors d'une récente interview, pour signifier qu'il était temps que la population musulmane - "Je n'aime pas le terme de communauté" - entre au gouvernement. "Depuis de Gaulle, personne n'avait envoyé un signe aussi fort, on entend souvent des déclarations plaisantes, mais elles ne sont presque jamais suivies d'actes." Comment l'orphelin de père, issu d'une famille rurale, sinon du bled - Souk Ahras est l'antique Thagaste, patrie de saint Augustin, dont M. Mekachera connaît bien l'itinéraire miraculeux - s'est-il retrouvé dans une telle position ? En ne résistant pas à lire la lettre de félicitations, au style fleuri, que lui a adressée Abdelhamid Latreche, ancien ministre des armées algérien, président de la commission de la défense nationale du Conseil de la nation, M. Mekachera fournit un indice : "Comme beaucoup de cadres dirigeants de l'Algérie d'aujourd'hui qui ont choisi l'autre camp, Latreche était avec moi aux enfants de troupe."

Enfant de troupe. A l'école militaire de Miliana, dans les environs d'Alger, soit à 800 km du foyer familial. C'est là qu'en 1943, à 12 ans et demi, sur décision de sa mère, s'est scellé son destin. Cet arrachement s'accomplit sans révolte et sans trop de souffrance - "Comme j'avais ma fierté, j'allais aux toilettes pour pleurer", avoue-t-il -, tant était vif son goût de l'uniforme et de la " vie au carré".

Après le bac et la prépa, l'élève Mekachera, devenu sous-officier, doit s'engager pour cinq ans. A 19 ans, il se retrouve en Indochine, sergent au 6e régiment de tirailleurs algériens à la tête d'une section qui crapahute dans la trouée de Hoa-Bin. Sur cette époque, dont il n'a rapporté que des " souvenirs atroces", M. Mekachera n'aime guère s'étendre. A-t-il été amené à tuer ? "Celui qui vous dit "J'ai tué", il bluffe, et celui qui vous dit "Je n'ai pas tué", il bluffe aussi. Dans les combats, on voit rarement sur quoi l'on tire", répond-il simplement. Cinq jours de marche dans la jungle pour rejoindre sa base après un accrochage lui vaudront une médaille, mais c'est "dégoûté de la guerre"qu'il termine son temps et, en 1954, rejoint sa région natale où il est employé comme inspecteur de police auxiliaire.

En 1957, pas guéri de l'armée, il est admis à l'école d'officiers de Saint-Maixent. Un an plus tard, sorti bien classé, il intègre le 93e régiment d'infanterie basé à Courbevoie. La même année, il se marie à une Poitevine, élève infirmière à Niort, qui lui donnera deux filles et trois garçons.

Nouveau retour en Algérie, en septembre 1959, toujours au bord de la frontière tunisienne, entre Souk Ahras et le littoral, mais cette fois comme lieutenant au 60e régiment d'infanterie, et dans des circonstances dramatiques. Plusieurs de ses copains de promotion ont rejoint le FLN. S'il ne les juge pas, M. Mekachera ne peut s'empêcher de considérer que " l'on ne trahit pas le pays qui vous a formé". Son unité a pour mission de surveiller la ligne Maurice, érigée entre l'Algérie et la Tunisie. Deux années durant, il l'accomplira, sans problème de conscience. " Quand tout est brouillé, il faut rester soi-même. Dans cette guerre sans nom et sans front, il ne s'agissait pas de gagner du terrain mais des cœurs. Mon engagement moral vis-à-vis de l'armée française était plus fort que tout."

Le général Georges Roidot, qui commandait alors le 3e bataillon du 60e RI, confirme : " Mekachera était un officier d'une totale loyauté. Il avait sous ses ordres des appelés auvergnats et jurassiens, mais, parmi les supplétifs des deux compagnies de harkis qui étaient là en appui, il en connaissait plusieurs personnellement. Heureusement, la ligne de barbelés remplissait son rôle et la zone était relativement calme." Le lieutenant Mekachera reçoit quelques lettres anonymes mais prévient les débordements : "J'ai fait en sorte que mon unité puisse avoir une certaine culture comportementale." Les interrogatoires poussés, la torture ? Il affirme ne jamais y avoir assisté, tout en admettant que leur existence était "possible".

Après un stage en métropole, Hamlaoui Mekachera aura une nouvelle affectation en Algérie comme conseiller technique du préfet de Bône. Lorsque le cessez-le-feu intervient en mars 1962, la situation est plus tendue que jamais. Coupé de l'armée, il s'efforce d'éviter les affrontements. Toutefois, le 26 juin 1962, c'est dans "une atmosphère de sauve-qui-peut"qu'il embarque à l'aéroport d'Annaba. La page est tournée. Ses enfants ne connaissent pas l'Algérie où il n'est retourné qu'une fois, en 2001, en voyage officiel. "Je ne suis pas sec, personne ne peut oublier ses racines, mais je respecte par-dessus tout... le pays où je suis né."

La deuxième vie de M. Mekachera, promu capitaine puis commandant, est moins mouvementée mais aussi singulière. A 38 ans, il décide de reprendre des études, s'inscrit à la faculté de droit de Nantes, puis à Paris-II où il obtiendra une licence de droit public complétée par un certificat de criminologie. Plus qu'un défi, une remise en question. Alors qu'il se voit "terminer colonel, comme tout le monde", il veut changer d'horizon et demande son affectation dans une autre administration. Il choisit la santé et est nommé, en 1977, directeur du centre psychothérapique du Jura, où il restera jusqu'en 1986, avant de prendre, durant neuf autres années, la direction du Centre hospitalier spécialisé du Jura.

Homme de droite, militant au RPR depuis le début des années 1990, l'ancien fantassin Mekachera est entré en politique par la voie associative. A la hussarde, mais avec un redoutable talent de tacticien. En 1990, absent lors des états généraux du Conseil national des Français musulmans (CNFM), il est néanmoins élu président. Roger Romani, chargé de mission auprès du président de la République, qui, lorsqu'il était ministre chargé des rapatriés, a collaboré avec M. Mekachera, le considère comme un "sphinx" ; il loue "son dévouement, son humanité et sa passion pour la cause des harkis" - dont il a su dénouer certaines crises.

C'est en grande partie grâce audit "sphinx" que les voix des anciens harkis sont tombées dans l'escarcelle de Jacques Chirac - un vote à bulletin secret organisé lors du dernier congrès du CNFM a donné 93,6 % pour Chirac au premier tour. Le président est, pour lui, " un exemple de rigueur et d'humanisme". Leur première rencontre remonte à 1994. L'année suivante, il fait campagne en première ligne. Et récidivera en 2002, encore plus ardemment. " C'est un inconditionnel de Chirac, il serait prêt à se faire tuer pour lui", assure Eric Raoult.

La première "récompense" intervient après l'élection présidentielle de 1995. M. Mekachera devient délégué interministériel à l'intégration. "C'est Jacques Chirac en personne qui m'a demandé de le nommer auprès de moi", se souvient M. Raoult, alors ministre de l'intégration et de la lutte contre l'exclusion. Ce "chic type, un peu raide", qui a du mal à tutoyer son ministre, sait dialoguer avec les jeunes des cités, même lorsqu'ils traitent le ministre de " bouffon". Modèle vivant d'intégration, il travaille sur la mixité des logements sociaux, la lutte contre les discriminations (principalement à l'entrée des boîtes de nuit), les délais de naturalisation, etc. - tous dossiers qui, assure-t-il, ont été "repris par les socialistes". Adeline Hazan, secrétaire nationale du PS et ancien membre du cabinet de Martine Aubry, chargée de " remercier" M. Mekachera en 1998, estime pourtant que "son bilan était très mince". A la suite de cette "démobilisation", M. Mekachera est nommé au Conseil économique et social.

Alors qu'il n'est pas pratiquant, M. Mekachera a également cherché à jouer un rôle dans la tentative d'organisation du culte musulman en France. En 1998, il prend d'assaut la présidence du Conseil représentatif des musulmans de France, mis en place, en 1995, par Dalil Boubakeur, recteur de la Mosquée de Paris. L'opération visait à favoriser un islam "à la française", à l'abri des intégristes. Elle a tourné court et M. Mekachera n'insiste pas. "La religion est une question très personnelle qui ne doit pas cacher des choses inavouables", lâche-t-il, sentencieusement.

Dans le milieu, pourtant très hétérogène, des associations d'anciens harkis, la nomination de M. Mekachera semble faire la quasi-unanimité. Hacène Harfi, président de la coordination harka de Saint-Laurent-des-Arbres (Gard) et vice-président du CNFM, se déclare naturellement "très fier de la nomination d'un homme très dévoué qui va être bénéfique pour toute la communauté". Boussad Asni, président du Comité national de liaison des harkis (CNLH), le considère toujours comme faisant partie "d'une élite d'anciens commandants ou d'anciens colonels", mais reconnaît qu'il s'est "imprégné de la misère et de la souffrance de notre population". En mars, lors de son congrès, le CNLH a appelé à voter Chirac, dont les promesses "correspondaient à 70 % de ses attentes". Seul Amouche Zerouki, militant longtemps proche du mouvement France plus et qui participa notamment à une longue grève de la faim, est plus réticent, qui voit en M. Mekachera "une personnalité très médiatisée et très politisée, à des années-lumière des problèmes de terrain vécus dans le Sud-Est et le Sud-Ouest".

De fait, les problèmes les plus aigus des harkis, ces "oubliés de l'histoire", ne relèvent pas des compétences de M. Mekachera - une mission interministérielle aux rapatriés a été mise en place sous la houlette d'un préfet - et il aura davantage de rapports avec les anciens d'Indochine ou d'Algérie. Loin de les redouter, il est sûr que le courant passera. "Parce que je sais ce que c'est que le monde combattant."


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